Compte-rendu de la conférence "Sauvons l'abeille noire".
Le Syndicat d'Apiculture de Haute-Savoie a accueilli samedi 18 février 2017 à Amancy le Professeur Lionel GARNERY, chercheur au CNRS à Gif sur Yvette, maître de conférences à l’Université Versailles Saint-Quentin en Yvelines et spécialiste de la génétique de l’abeille noire.
Ce chercheur se bat depuis de longues années pour préserver l'abeille noire et sanctuariser les Conservatoires d'Apis Mellifera Mellifera afin de conserver les formidables caractères génétiques d'adaptation que celle-ci a développé pour survivre aux différents bouleversements climatiques depuis un million d'années.
Voici un compte-rendu succinct de cette conférence sur l’abeille noire :
Mr Lionel Garnery a dans un premier temps présenté la phylogéographie et l’histoire évolutive de l’espèce Apis Mellifera mellifera
Apis mellifera mellifera (abeille noire) est issue de l'expansion de l'espèce Apis mellifera qui a colonisé à partir du Moyen-Orient, l'Europe et l'Afrique selon 4 grands axes donnant naissance à 4 grandes lignées (une 5eme a été découverte récemment la lignée Z).
Fig 1
Apis mellifera mellifera est présente en Europe de l'ouest depuis un milion d'années.
Lignée M : Apis mellifera mellifera Lignée C: Apis mellifer carnica, Apis mellifera ligustica... Lignée O: Apis mellifera caucasica, Apis mellifera anatolia... Lignée A : Apis mellifera saharensis, Apis mellifera scutellata, Apis mellifer monticola....
Elle a survécu a deux glaciations en trouvant refuge sur le pourtour méditerranéen et dans le sud-ouest de la France.
A la fin de la dernière glaciation, il y a 10 000 ans, elle est partie à la conquête du Nord de l’Europe et s’est installée des Pyrénées à l’Oural. Au fil du temps elle a donné de nombreux écotypes parfaitement adaptés à leur environnement.
Figure 3 :Apis mellifera, races et variétés au Nord du Sahara et en Europe. Hans Roy in pedigreeapis.org
Apis Mellifera Mellifera est la plus ancienne des sous espèces d’Apis Mellifera et la moins variable génétiquement à cause de son isolement des autres populations au cours des 2 glaciations.
Ces caractères génétiques sont donc fixés et transmissibles aux générations futures.
La rudesse des changements climatiques qu’elle a eu à subir a produit une abeille ayant les meilleures facultés d’adaptation aux changements climatiques.
Crédits photos : (anonyme) Nature et Progrès du Tarn
L’abeille noire est capable de réduire ou d’augmenter sa ponte en fonction de la météo (froid, sécheresse ou au contraire conditions climatiques favorables).
C’est, d’après le Pr Garnery, l’abeille idéale pour faire face au réchauffement du climat que nous commençons à vivre.
Mais un million d’années d’adaptations risque d’être balayé en 50 ans !
Pourquoi ?
* L’invention de la ruche à cadres mobiles permet d’accéder au cœur de la colonie avec possibilité d’agir sur la reproduction des reines.
* L’apiculture se tourne vers la production intensive de miel, abandonnant du même coup la rusticité de l’abeille.
* Elle recherche des abeilles plus performantes en terme de récolte et importe à tout va des essaims et des reines du monde entier (Australie, Argentine, Danemark…).
* La transhumance dissémine les caractères génétiques des reines et des faux-bourdons des colonies importées sur tout le territoire.
* Les pathogènes accompagnent cette invasion, fragilisant ainsi l’état sanitaire des colonies indigènes (Noséma ceranea, varroa...) .
* La sélection par les apiculteurs de caractères de productivité se fait au détriment des caractères de rusticité. (Des colonies qui propolisaient beaucoup étaient considérées comme des non-valeurs il ya peu !)
* L’insémination artificielle des reines entraîne un contrôle total de l’homme sur la génétique adaptée à ses besoins au risque de perdre à tout jamais les caractères génétiques qui seront nécessaires à la survie de l’abeille dans les années à venir.
Crédits photos : sciencabilly Paul Starosta
* L’abeille Buckfast, qui est une abeille complètement artificielle, est très utilisée par les producteurs de miel. Le Pr Garnery met d’ailleurs en garde contre les pratiques des éleveurs de reines de cette abeille qui n’a plus grand-chose à voir avec la Buckfast d’origine. Cela accentue encore le « brouillard » génétique qui est en train de gagner tout le territoire français.
* Le fractionnement des aires de milieux naturels limite les évolutions génétiques naturelles de l’abeille noire qui se trouve isolée dans de petits territoires.
* Le statut juridique de l’abeille qui est considérée comme étant une espèce animale domestique ce qui ne lui permet pas d’ être inscrite sur la liste des espèces sauvages menacées d’extinction.
* L’individualisme des apiculteurs qui ne se soucient guère des zones de conservatoire de l’abeille noire en installant des abeilles exogènes sur ces mêmes zones.
* Le manque cruel d’éleveurs de reines et de colonies d'’abeilles noires sur le territoire.
Que faire ?
* Sensibiliser les apiculteurs(trices) les citoyens et les élus sur la nécessité de conserver cette abeille qui a le patrimoine génétique le plus adapté au défi du changement climatique.
* "Bousculer" les syndicats apicoles qui favorisent l’apiculture de production (avec les résultats que l’on sait …) en parrainant des colonies d’abeilles Buckfast dans des campagnes de promotion de l’apiculture au lieu de développer une apiculture durable.
* Créer et faire respecter les conservatoires de l’Abeille Noire.
* Solliciter les élus (députés, sénateurs, ministres…) pour qu’ils créent un véritable statut juridique pour les conservatoires afin de sauvegarder le travail de sélection et de restauration qui y est mené.
En conclusion :
Le professeur Garnéry soulève le paradoxe de l’apiculteur qui se veut le chevalier blanc de la biodiversité et qui détruit par ses pratiques une abeille « vieille » de 1 million d’années sur son territoire et parfaitement adaptée au grand défi du changement climatique qui frappe à notre porte.
Il souligne aussi l’utilisation massive du nourrissement des colonies et l’introduction d’intrants en tout genre pour soutenir des abeilles complètement inadaptées à notre environnement.
D’après lui, le coût économique sur une exploitation apicole est énorme. Il vaut mieux produire la même quantité de miel avec 400 colonies capables de s’auto gérer qu’avec 200 colonies à qui il faut apporter des soins constants et un nourrissement important.
« Il faut rendre ses terres à l’abeille locale ».
En complément de ce compte-rendu vous trouverez ci-après un article du magazine "Reporterre" présentant le Professeur lionel Garnery et son travail ainsi qu'une petite vidéo sur le conservatoire de l'Abeille Noire de Savoie. (Il faut noter aussi le projet de conservatoire de l'Abeille Clusienne dans la Haute Vallée du Giffre qui est en cours de création.)
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